Margaux Buyck. La Fondation Warhol serait-elle sur le point de mettre la clé sous la porte en organisant une grande braderie des œuvres du « Pope of the pop », Andy Warhol ?
C’est la question que l’on pourrait se poser lorsqu’en septembre The Warhol Foundation of the Visual Art dans un communiqué annonçait se séparer de l’ensemble de sa collection, lors de ventes aux enchères organisées par la maison Christie’s.
L’annonce a eu l’effet d’une bombe dans le milieu de l’Art contemporain. En effet, alors que la fondation ne vendait que quelques œuvres de sa collection chaque année, le 12 novembre 2012 débutera la vente la plus massive d’œuvres d’Andy Warhol que le marché de l’Art n’ait jamais connu. Au total près de 300 peintures, 1000 estampes et sérigraphies et des milliers de dessins seront cédés au cours d’enchères, de ventes privées et de ventes en ligne (seulement à partir de février 2013).
Dans un communiqué commun, la fondation Warhol et Christie’s ont insisté sur le fait que «beaucoup (d’œuvres) n’ont jamais été vues par le public». De quoi attiser la curiosité et l’intérêt de potentiels collectionneurs. La fondation espère ainsi récupérer près de 100 millions de dollars.
Le président de la Warhol Foundation, Joel Wachs, explique par ailleurs, que les recettes de ces enchères permettront à la fondation d’augmenter le nombre de subventions destinées aux organisations culturelles et aux divers projets artistiques qui se trouvent de plus en plus en difficulté en cette période de crise. Joels Wachs affirme également: « Partout dans le monde, les gens s’intéressent à Warhol. Nous voulons pouvoir répondre à cette demande autant que possible ».
Soit dit en passant un Warhol n’est pas à la portée de toutes les bourses. Les œuvres du pape du Pop Art sont en effet connues pour atteindre des sommes exorbitantes. Au mois de mai, le portrait d’Elvis (Double Elvis (Ferus Type)) a été vendu 33 millions de dollars. Que le commun des mortels se rassure, la fondation prévoit, pour fêter son 25ème anniversaire, de faire don de plusieurs œuvres de l’artiste à des musées. Cependant, le nombre d’œuvres cédées gracieusement n’a pas été évoqué pour le moment.
Malgré les raisons avancées par la Warhol Foundation afin de justifier cette dispersion massive du patrimoine culturel d’Andy Warhol, on peut s’interroger sur cet important changement dans la politique de l’institution et sur l’impact d’une telle manœuvre autant d’un point de vue financier que culturel.
Cette nouvelle initiative de la fondation n’est en réalité que l’acte II d’un plan initié l’automne dernier avec la dissolution du comité d’authentification. La fondation justifiait cette décision en évoquant des frais judiciaires trop coûteux. Il est vrai que ces dernières années la fondation s’est retrouvée plusieurs fois sur le banc des accusés. En 2007 par exemple, le collectionneur Joe Simon-Whelan dépose une plainte contre The Warhol Foundation qui aurait refusé d’authentifier certaines œuvres pouvant appartenir à l’artiste. Elle se voit alors accusée d’être engagée « dans une conspiration pour restreindre et monopoliser l’échange d’œuvres d’Andy Warhol sur le marché ».
L’annonce de la vente massive de la collection n’a fait qu’accroître l’animosité des collectionneurs de Warhol envers la fondation. Les collectionneurs craignent qu’une apparition en masse d’œuvres d’Andy Warhol sur le marché, dévalue le travail de l’artiste. Alberto Mugrabi, collectionneur dont la famille possède près de 800 Warhol confiait au Wall Street Journal que si la fondation continuait à « balancer (les œuvres de Warhol) sur le marché comme du bétail », elle finirait par « diluer » la force de ces œuvres. Le quotidien américain précise également que la fondation aurait décliné l’offre d’Alberto Mugrabi et d’autres collectionneurs qui se portaient acquéreurs de l’ensemble de la collection. D’un point de vue financier, The Warhol Foundation avait tout intérêt à refuser cette proposition. L’institution bénéficie en effet d’un climat favorable. D’une part, la côte de l’artiste est en constante augmentation et les ventes de Warhol ne se sont jamais aussi bien portées. Par ailleurs, les enchères à venir jouissent d’une visibilité extraordinaire due à la collaboration de la Warhol Foundation avec la maison Christie’s et au caractère exceptionnel et inattendu de l’événement.
Si la presse internationale a amplement répercuté la nouvelle, s’interrogeant sur les raisons d’une telle initiative et sur les répercussions sur le marché de l’Art, peu d’entres nous se sont interrogés sur l’impact culturel de la mise aux enchères de cette collection. La Warhol Foundation of The Visual Art avec cette manœuvre financière dissout et éparpille l’une des plus importantes collections au monde d’œuvres d’Andy Warhol, au profit pour l’essentiel de collectionneurs particuliers. En agissant ainsi, la fondation n’en oublie-t-elle pas l’une de ses missions principales consistant à authentifier, rassembler et promouvoir l’oeuvre d’une des icônes du Pop Art et de l’Art contemporain.
